Beauté et splendeur sonores à Niederanven

Publié le par Paul Moes

Beauté et splendeur sonores à Niederanven

 

Wolfgang Talirz, alto

 

 

Bonne nouvelle pour tous les amateurs de Musique de Chambre! Le Luxembourg dispose d'une nouvelle salle, d'une superbe acoustique, au Kulturhaus de Niederanven. Telle est notre conviction après le remarquable concert donné par la Philharmonische Camerata Berlin, dans le cadre de "Musek am Syrdall" vendredi le 9 mai 2008. Lors de l'inauguration de cette salle nous avions craint que les grandes surfaces de verre puissent nuire à l'acoustique en repoussant les sons dans la salle. Craintes sans objet, le bois qui entoure la scène garantit à la musique une acoustique claire et précise dans les aigus mais surtout chaude et pleine dans les graves. Un vrai bonheur d'écoute! Félicitations au concepteur qui a su gérer le matériau utilisé (verre et bois) avec talent et compétence. Entouré d'un oasis de verdure reposant, la belle salle dont l'obscurcissement a été amélioré depuis l'inauguration à accueilli un très nombreux public vendredi, venu d'ailleurs pas seulement de la vallée de la Syre, mais nous avons rencontré des mélomanes qui venaient de partout. Et si Jeannot Waringo a remarqué, avec l'humour que nous lui connaissons, que "Musek am Syrdall" avait osé sortir de ses frontières traditionnelles en venant à Niederanven, nous osons répondre qu'il se trouvait en territoire ami et qu'avec un programme d'une telle qualité il y sera toujours le bienvenu.

 

Nous ne ferons, ni à Romano Tomasini, ni à ses collègues l'affront de présenter l'ensemble à cordes issu du prestigieux Orchestre Philharmonique de Berlin. Nous nous limiterons à la musique!...et le quintette à cordes.

 

Historiquement très lié au quatuor à cordes, qui depuis son apparition au 18e siècle a connu une popularité constante, le quintette, à part quelques remarquables exceptions, joue un rôle plus effacé. Ainsi les six quintettes pour cordes de Mozart sont moins connus que ses quatuors, ceci, probablement surtout, parce que la composition "quintette" est plus rare que celle du quatuor. Les deux quintettes pour cordes KV 515 et KV 516 écrit en été 1787, font incontestablement partie des chefs-d'œuvre de Mozart. Le Quintette N°3 en do majeur KV 515 étant, par ailleurs, l'œuvre de musique de chambre la plus longue de Mozart. La tonalité de do majeur convient parfaitement à l'espièglerie sublime que Mozart à mise à la base de cette œuvre, bien que, comme dans toutes les œuvres écrites entre 1785-1795, le symbolisme de l'ombre à la lumière est fort présent.

 

Avant de nous concentrer sur l'interprétation, nous ne voulons nous refuser le plaisir de citer Robert Schumann qui dans un texte de 1838 décrivit la particularité du quintette à cordes ainsi:" Incroyable à quel point l'intervention d'un simple alto supplémentaire modifie la sonorité du quatuor et lui donne un caractère totalement différent. Les voix intermédiaires gagnent en force et en dynamisme, les partenaires forment une masse plus compacte. Alors que le quatuor permet de distinguer quatre musiciens individuels, le quintette fait l'effet d'un groupe soudé. Dans cette situation, l'harmoniste peut s'en donner à cœur joie et mettre son talent à l'épreuve en entrelaçant les voix de mille façons".

 

Dès le début la Camerata fait preuve d'une volonté infaillible de créer une entité aussi bien musicale qu'humaine. Si pour nous Wolfgang Tarlitz (alto) a été la révélation de la soirée, nous ne pouvons passer sous silence l'excellente prestation du premier violon Keisuke Okazaki. Nous pensons en effet (surtout dans Mozart), que Okazaki joue au plus haut niveau de perfection technique et avec une puissance extraordinaire. L'empreinte musicale de son interprétation se caractérise à la fois par une force intellectuelle et une intensité émotionnelle extraordinaire. Tout respire dans l'interprétation de l'ensemble avec un naturel confondant et l'on reste pantois devant une telle perfection. Chaque inflexion, chaque phrasé trouve une couleur particulière au cœur d'un discours musical baigné de sentiments sereinement évoqués. Irrésistible!

 

Le Quintette à cordes N°3 de Dvorak, fait la part belle à l'alto. On y ressent la prédilection de Dvorak pour cet instrument que le compositeur pratiqua au sein de l'orchestre du Théâtre de Prague. Cette œuvre compte parmi les meilleures compositions de musique de chambre de Dvorak, par son invention mélodique mais surtout parce que Dvorak y maitrise pleinement son art. Les mélodies d'inspiration folklorique sont parfaitement intégrées, dans un mariage personnel avec les formes héritées de la tradition classique. Interprété avec une extrême virtuosité par l'ensemble, nous avons surtout aimé la sonorité chaude et chaleureuse de l'alto de Wolfgang Talirz. Du très grand Art!

 

Une grande soirée de musique de Chambre.

 

Nous parlons rarement du sponsoring. Mais qu'une société comme Deloitte sponsorise les petits organisateurs (ceci sans aucune connotation péjorative) pour les aider à organiser des concerts indispensables, nous semble digne d'être souligné.

 

Le dernier concert de cette saison de "Musek am Syrdall" a eu lieu, avec le même ensemble, samedi 10 mai 2008 en l'église de Roodt-sur-Syre. Nous pouvons assurer à Jeannot Waringo et à son comité que l'édition 2008 fut un très grand crû, riche en émotions profondes (Camerata) et découvertes enrichissantes (Wranitzky).

 

Nous serons au rendez-vous en 2009. Avec un énorme plaisir!

 

Paul Moes

Publié dans mai 2008

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